Ni show ni froid #8

Après une journée où la pluie a glacé les os, Jérémy Roy a débuté sa récupération par un bain de cryothérapie à moins 120 degrés. Même pas froid, nous explique-t-il.

Le proverbe dit que chaque étape du Tour de France est une classique en elle-même. Alors suivant l'analogie, cette sixième étape avait tout de la course flandrienne du début de printemps, avec du vent et la pluie qui glace les os. On a roulé pendant 226 km avec des averses qui nous tombaient sur le coin du nez. Le final était nerveux sur un parcours casse-pattes: ça roulait vite dans le peloton et je me suis pris un petit coup de bordure. En résumé, je suis passé par la fenêtre. Je me suis retrouvé dans un groupe avec Sylvain Chavanel. Il n'était pas au mieux: il avait tellement mal à l'épaule qu'il ne pouvait pas se mettre en danseuse et ne pouvait même pas attraper ses barres dans la poche de son maillot. Il m'a même demandé un petit coup de main à un moment. Personnellement, j'avais encore les jambes un peu dures.

Dans un sarcophage à moins 120 degrés

Cela peut paraître paradoxal mais après avec cette journée dans le froid, je me suis jeté dans un bain à moins 120 degrés. C'est notre nouvelle méthode de récupération qui rappelle des expériences de science fiction: la cryothérapie. C'est un outil que j'ai essayé pour la première fois l'année dernière et qui est à la disposition de l'équipe depuis notre stage d'avant-Tour en juin. En résumé, on entre dans un sarcophage installé dans une camionnette et on s'offre trois minutes de bain dans un air asséché et refroidi aux vapeurs d'azote liquide. La température qui apparaît sur le thermostat fait peur mais cela n'a rien à voir avec un climat polaire: l'air est sec et c'est moins violent qu'un bain glacé (ce que je n'ai jamais fait) ou qu'une douche écossaise. Je reconnais que la dernière minute de séance attaque un peu la peau mais j'en sors sans chair de poule. Avec une sensation d'être anesthésié qui peut préparer le massage.

Cela ne remplacera jamais un massage mais cela peut être un excellent complément. Toutes les équipes pourraient s'y intéresser puisque l'UCI interdit depuis le Giro toutes les injections, y compris pour les produits de récupération. On sait déjà que le froid est très efficace pour la récupération en cas de blessures et traumatismes. C'est l'effet poche de glace. Ces séances qu'on suit le soir ou le matin permettent de baisser la température interne du corps en cas de forte chaleur, de faciliter l'endormissement le soir, voire de renforcer les défenses immunitaires et de tomber malade moins souvent. Dans une démarche curieuse, je prends mon bain d'azote refroidi j'attends les effets visibles sur trois semaines. Pour en finir avec la mécanique, pendant que le circuit de refroidissement tourne à plein régime, le bus de notre équipe est en panne. Bilan du mécanicien: potentiomètre de l'accélérateur en panne. Dans le pire des cas, nous ferons le briefing vendredi matin dans le coffre des voitures. A côté des bonnes vieilles glacières.